Contrat et allocations scociales : aide ou menace pour la dignité humaine ?
,,, Paul Palsterman fait le pari d'interroger les fondements du droit à la protection sociale pour évaluer le principe de contractualisation de l'intervention sociale, c'est-à-dire le principe qui permet de conditionner l'octroi des allocations sociales à la signature d'un « contrat » par lequel le bénéficiaire s'engage personnellement à être acteur de sa propre réinsertion. Avant de réfléchir à la forme particulière de conditionnalité que revêt la contractualisation, l'auteur pose le problème de la conditionnalité en soi et constate que jamais, dans les textes fondateurs de la sécurité sociale, les droits n'ont été autres que contributifs, ce qui distingue d'ailleurs la solidarité sociale et institutionnelle de la charité privée ou collective.
Si la solidarité s'est imposée avec le temps comme le vecteur majeur de la couverture des risques, de la redistribution des revenus et de la réduction des inégalités, c'est bien entendu grâce à l'action collective, principalement du mouvement ouvrier, mais aussi parce qu'elle a démontré avec le temps son efficacité face aux problèmes posés par la société salariale. Et cette efficacité tient au fait qu'elle implique les individus à la fois comme contributeurs et à la fois comme bénéficiaires, surtout si on se met dans une perspective intra- et intergénérationnelle. Cela entraîne des droits, mais aussi une double obligation, celle de contribuer au financement de la solidarité, et celle de limiter dans la mesure de ses possibilités les risques qui pourraient conduire à solliciter le bénéfice de la protection sociale.
Pour Paul Palsterman, les fondements ne sont pas seulement historiques, ils sont aussi éthiques et politiques puisque la « notion de contrat, en ce qu'elle reconnaît les allocataires sociaux dans la diversité de leurs situations et de leurs projets, et en ce qui fait d'eux des acteurs de leur réinsertion, paraît dans son principe la meilleure formulation de ce que l'on peut légitimement attendre d'eux ».
Les fondements étant solides, il faut donc prendre la contractualisation au sérieux, ce qui implique une série de conditions de nature diverse. D'abord, cela exige de la part des pouvoirs publics des investissements importants en moyens humains et financiers pour mettre en œuvre des dispositifs « sur mesure », ensuite cela nécessite que la négociation et la conclusion du contrat puissent se faire si besoin avec le soutien d'une personne ou association choisie par l'allocataire social concerné. Enfin, et c'est le plus important, il s'agira de définir les formes de participation considérées comme légitimes dans une logique d'insertion socioprofessionnelle si l'on veut tant soit peu équilibrer les devoirs des individus à entreprendre des démarches pour retrouver un emploi et les devoirs d'une société à fournir aux personnes des possibilités concrètes d'insertion, mais aussi un emploi convenable.
Ces conditions sont d'autant plus importantes à considérer si l'on tient compte de la contribution de la psychologie sociale au débat. Partant du même constat selon lequel l'individu est appelé à être le principal artisan de sa (ré)-insertion professionnelle, la question est de savoir comment le chômeur réagit au fait d'être dans cette situation de demande d'emploi dans un contexte de déficit d'emploi et quels sont les effets psychosociaux produits par un dispositif particulier qu'est le Plan d'accompagnement et de suivi des chômeurs. La question de la légitimité reste posée, mais elle se situe dans la façon dont les personnes impliquées perçoivent l'« accompagnement » qui est censé les servir.
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Langue : FRANCAIS
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