En 2014, interpellés par les changements professionnels que vivent les travailleurs sociaux, le C.D.G.A.I. et l'Établissement d'Enseignement de Promotion sociale C.P.S.E. se sont associés
afin d'organiser une matinée visant à éclairer, sensibiliser et impulser une réflexion collective autour des changements dans le travail social. Les 150 participants et participantes qui ont contribué à la richesse de cette journée de réflexion collective ont tenté d'identifier les stratégies face à la souffrance éthique et les pistes de solution envisageables. Ils ont mis en avant que si les stratégies individuelles répondaient à la souffrance éthique (stratégies d'adaptation), elles n'ont cependant aucun effet sur les causes de cette souffrance. La question devient alors : comment passer des stratégies individuelles aux stratégies collectives ?
Pour situer sa réflexion autour de la «souffrance éthique» ou «d'éthique en souffrance» Bruno Frère se penche sur la question du care et du travail social et tente de montrer que l'on peut aujourd'hui s'essayer à les construire en termes d'éthique. Afin de présenter cette conception démocratique de l'éthique, il dresse un bref récapitulatif historique afin de démontrer comment éthique et économie ont toujours été liées l'une à l'autre mais comment l'éthique s'est déplacée de l'état providence à l'entreprise contemporaine. Dans un troisième temps, il s'attache au travail social proprement dit: «Vous savez, nous, on aimerait bien aider les chômeurs et les aider par exemple à construire des coopératives ou des associations». «Notre rêve, ce serait de pouvoir développer, avec les chômeurs, des coopératives de restaurants qui puissent offrir des repas relativement peu chers aux personnes précarisées
et aux personnes âgées dans certains quartiers, des coopératives qui fonctionneraient en circuit court avec des fermiers locaux. Les chômeurs avec lesquels nous
travaillons sont tout à fait partants, sauf qu'on ne peut pas le faire parce que c'est super risqué. Parce que nous recevons des financements des fonds sociaux européens et qu'en fin
d'année, si X chômeurs ne sont pas parvenus à réintégrer le marché du travail conventionnel, les financements nous sont supprimés. Du coup, nous aidons les chômeurs à monter des
snacks ou des pizzerias, ou des structures tout à fait classiques, qui ont bien plus de chances de réussir sur le marché que des coopératives de restaurants bio et équitables, lesquels ont
toutes les chances de ne pas tenir le coup sur la ville parce que la concurrence sera trop importante et parce que c'est bien plus compliqué à mettre en place.»
À nouveau : activité, flexibilité, autonomie, motivation, adaptabilité, employabilité, ... tous ces termes-là qui pèsent aujourd'hui sur les épaules des personnes privées d'emploi sont
des termes qui ont été sinon conçus, en tout cas véritablement portés, par le monde de la production économique qu'est l'entreprise privée. Cette éthique-là, hétéronome, pourrait à mon sens laisser la place à une éthique beaucoup plus autonome, une éthique qui serait «déséconomicisée». Cette éthique serait alors, politique. Il s'agirait pour le travail social, dans l'optique d'une éthique autonome, de sortir du contrôle social pour appuyer une éthique qui aille dans le sens de l'émancipation.
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En 2014, interpellés par les changements professionnels que vivent les travailleurs sociaux, le C.D.G.A.I. et l'Établissement d'Enseignement de Promotion sociale C.P.S.E. se sont associés
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